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Adextre

Je n’aime pas les jours d’élection

La journée commence à peine que les médias s’illustrent déjà par la vacuité de leurs informations. Je consulte les journaux en ligne ; certains ont prévu un direct, c’est-à-dire une page qui s’actualise à mesure que les nouvelles arrivent. Le problème est que, avant les résultats partiels de vingt heures, ils n’ont pas grand-chose d’intéressant à proposer – c’est un euphémisme. Ainsi croient-ils opportun de nous avertir à coup de flash du déplacement de chaque personnalité politique de premier plan à son bureau de vote alors que cela n’a, évidemment, aucun intérêt.

À midi, les commentateurs professionnels s’agitent sur l’abstention. Ils font mine de déplorer le désintérêt croissant des Français pour la politique en rabâchant les mêmes explications de plateau en plateau, et sans jamais se dire qu’une partie du problème pourrait venir d’eux-mêmes. Dans une semaine, la page de la participation déplorable sera tournée… jusqu’à la prochaine élection.

Pendant ce temps, les appels à voter se multiplient sur les réseaux sociaux. « Allez voter ! », « Il faut voter ! ». Pourquoi ? « Parce que c’est important. » Très bien, mais ce genre d’injonctions ne fait-il pas plus de mal que de bien à la démocratie ? Car nombre d’électeurs sont ainsi contraints de choisir à la dernière minute, au terme d’une prise de connaissance sommaire des professions de foi, l’élu de leur réflexion approximative, qui est souvent celui qui sert le mieux leur intérêt particulier avant l’intérêt commun. Et finalement, ils votent pour n’importe qui. La démocratie vaut mieux que ça. Nos ancêtres se sont peut-être « battus pour que nous ayons le droit de voter », mais s’intéresser cinq minutes par an à la chose publique avant d’aller au bureau de vote revient à leur cracher au visage. Mieux vaut voter blanc, à la limite, que de faire un choix dans de pareilles conditions.

Mon agacement me suit jusqu’au bureau de vote. Finalement, je le préfère vide tant le comportement de certains électeurs m’exaspère. Il y a ceux qui ne voudraient prendre qu’un seul bulletin pour ne pas toucher un bout de papier sur lequel est imprimé le nom d’un adversaire politique. Il y a aussi ceux qui ne prennent pas la peine d’aller dans l’isoloir, au mépris des règles électorales, pour afficher avec fierté et ostentation leur orientation politique.

Dans le même esprit, j’ai été témoin du comportement lamentable d’une jeune électrice lors du premier tour de l’élection présidentielle. Dans la longue file d’attente qui menait à la table de vote, nous étions rangés à proximité des enveloppes et des bulletins. D’un coup, elle s’est tournée vers son compagnon, qui avait les yeux rivés sur son smartphone, pour lui dire de sa voix grave, un brin éraillée, avec un air offusqué : « Oh là là ! J’ai vu un truc horrible… Tu vois la fille, là ? » en la montrant de l’index. « Elle a pris [les bulletins de] Macron, Zemmour, Le Pen et Pécresse, quoi ! » Le pluralisme et la démocratie sont une souffrance pour certains.

Il me semble pourtant que le vote est un acte grave qui mérite mieux que tout cela.

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